Il y a d’un côté des jeunes migrants, la plupart des mineurs, errant dans la rue, certains hébergés dans des gymnases indignes ou dans de miteux hôtels incertains par l’Aide sociale à l’enfance, qui n’hésite pas à s’en débarrasser au plus vite.Retour ligne automatique
De l’autre, des travailleurs sociaux de la PAOMIE, des petites mains bas de gamme du travail social, qui opèrent le tri des jeunes en fonction de leur majorité présumée, et qui jugent dans un rapport, qu’untel a le tort de regarder droit dans les yeux du « testeur » (un vrai mineur n’est pas si effronté, il baisse les yeux face à l’autorité), qu’un autre se montre agité pendant l’entretien et est donc soupçonné de mentir sur son âge. Toutes ces petites frappes du travail social qui éjectent tous les soirs dans la rue la grande majorité de jeunes qui demandent de l’aide.
D’un côté des jeunes courageux, qui ont traversé des continents pour fuir la misère, des guerres ou simplement pour voyager et arriver en Europe, au péril de leur vie (aujourd’hui Panaït Istrati [1], l’enfant voyageur, le conteur magnifique sans frontières, serait dans un centre de rétention, expulsé ou en prison du seul fait de son fol appétit pour le départ).Retour ligne automatique
De l’autre Pierre Henry, directeur général de France Terre d’Asile [2], dont la PAOMIE dépend, soupçonné de détournement d’argent public, et Fatou Sow, la pimpante et sinistre chef de service de cette permanence policière de tri des gamins, avec sa morgue de parvenue.
D’un côté des jeunes en colère qui occupent les locaux de l’ignoble PAOMIE. Et encore d’autres dehors, interdits de rentrer, sous la pluie, qui crient leur soutien à leurs copains, gazés par les flics lorsqu’ils osent approcher de quelques mètres. Tous dispersés dans la nuit, plus tard, dans le froid et sous la pluie après l’évacuation par la police, demandée par la burlesque Madame Sow, cheftaine du service du centre de tri, probablement anxieusement en attente d’une promotion professionnelle ou de figurer dans une quelconque liste électorale d’un quelconque parti de droite, genre PS, pour de quelconques élections (gageons qu’elle y parviendra : comme jadis l’insipide Rama Yade, ou les inénarrables Rachida Dati ou Fadela Amara).
D’un côté des gamins dans la rue qui ont mille histoires à raconter. Et leurs soutiens. Des gens qui ne supportent plus l’intolérable.
Arrêtons-nous un instant sur ces derniers :Retour ligne automatique
Il y en a qui ont organisé une permanence parallèle, l’ADJIE, en quelque sorte une contre-PAOMIE. Il y a des gens de RESF, du MRAP, du GISTI, du NPA, de SUD Solidaire, d’Alternative Libertaire, de la CNT, du Front de Gauche, du DAL, des Indigènes de la République, des autonomes, des habitants. Il y en a qui ne jurent que pour le respect des lois de la Protection de l’Enfance, d’autres (parfois les mêmes) qui passent des heures à faire un travail juridique exténuant pour sauver quelques meubles, à contacter d’autres camarades, lorsque des mineurs se font enfermer dans des centres de rétention, pour obtenir leur libération (deux jeunes enfermés en centre de rétention la semaine dernière, c’est-à-dire en prison, le véritable nom de ces petits camps de concentration pour des étrangers pauvres), à dénoncer les rapports grotesques commis par les travailleurs sociaux de la PAOMIE ou de l’ASE, à apporter tous les jours 200 repas dans la rue (le 115 du particulier), à les héberger par dizaines (le DAL), à apporter des fringues, de la bouffe, à collecter des sous, à accompagner des jeunes dans des bains-douches, à les héberger parfois chez eux, à les emmener à l’hôpital, car ils sont très nombreux à être malades. Ainsi Ahmed B., 15 ans, dont la PAOMIE lui refuse pendant plusieurs mois une « prise en charge » et qui finira, suite à l’inquiétude d’une femme très active dans le soutien des jeunes, aux urgences ophtalmologiques d’un hôpital : il va subir une ablation de l’œil car la prise en charge médicale a été trop tardive. Et encore d’autres soutiens qui préféreraient davantage rentrer en conflit, faire des actions, des occupations. Les engueulades ne sont pas rares. Mais ça tient. On arrive à tenir ensemble. Lors de l’occupation de la PAOMIE, après de brefs atermoiements de la part de quelques soutiens, on est restés ensemble jusqu’au bout avec les jeunes pour lesquels il n’était pas question de sortir autrement que par l’usage de la force policière.
Et puis il y a encore quelques élus EELV et autres ex-gauches plurielles qui se ramènent de temps en temps. On les reconnait à leur regard vitreux, l’air important, pendant qu’ils parlent sans discontinuer sur leurs Smartphones et autres I-Phones dernier cri et qui se scandalisent de la « gestion » de cette situation, après avoir collaboré pendant des décennies avec des gouvernements socialistes menant des politiques d’administration fascistoïde à l’égard des migrants pauvres arrivés en France. Mais passons.
D’un côté… et de l’autre. Il y a donc une division entre ceux qui prétendent nous gouverner et les autres, des autres pluriels qui sommes aujourd’hui aux côtés des jeunes dans la rue. Il y a la pluie dans la nuit pour les gamins affamés et le prochain cocktail organisé par la Mairie de Paris avec Hidalgo, peut être Versini [3], et la directrice de l’ASE parisienne, peut-être aussi Pierre Henry de France Terre d’Asile, soupçonné de détournement de fonds publics, et peut-être d’autres petites frappes promues comme Fatou Sow. On s’épargnera de faire une recherche pour comparer le montant global des dépenses de la Ville de Paris en frais de bouche, et autres mondanités, et l’argent voué à l’accueil des jeunes étrangers dans la rue. On s’épargnera ici pour l’instant d’évoquer le Grand Paris, méga-machine de valorisation capitaliste du territoire… Eux, ceux qui veulent nous gouverner en administrant le bonheur et le malheur des « populations », ceux qui ne sont pas nos amis, nous diront que nous sommes des populistes. Nous, qui sommes dans la rue, dans le local occupé de la PAOMIE, pourrons leur répondre qu’ils sont des « populicides ». Et qu’on les emmerde.
Oui, il y a division entre les François Hollande, Manuel Valls, Marine Le Pen, Anne Hidalgo, Pierre Henry, Dominique Versini et nous, ce rassemblement populaire sans frontières qui a occupé un centre de tri pour des jeunes dans la rue.
Nous, on n’en a pas fini. On préfère écouter les histoires des jeunes, être à leur côté, que les discours qui traduisent la bassesse des gens de pouvoir.
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